Dodécathlon 20.12

Après 20 ans, maintenant 12 mois, pour 12 défis un peu fous...

mardi 31 juillet 2012

Confident, but injury prone !

Je suis prêt pour la 10e édition du Endurrun International en Ontario dans deux semaines (12 au 19 août).  Pour précision, rappelons qu'il s'agit d'une compétition par étapes étalées sur huit jours dans le secteur ontarien de Waterloo.  Concrètement, il s'agit, dans l'ordre des journées où chaque matin se dispute une épreuve différente à partir d'un secteur ou village voisin, d'un demi-marathon (21.1km), d'un 15 km route, d'un 30 km trail, d'un 16 km route avec côtes, (jour de repos), d'un 26 km cross-country côteux, d'un 10 km route et pour finir d'un marathon (42.2 km).  Au bout de la semaine, cela totalise donc 160 km de compétition répartis entre les parcours plats, ascendants, les surfaces dures et les sentiers ou racines.  Plus amusant encore: chaque jour un classement cumulatif est fait et détermine, comme au Tour de France, le maillot jaune du lendemain.  Il y a aussi un maillot pour le meilleur grimpeur, le meilleur sprinteur et la meilleure recrue.  Les 2e et 6e étapes sont même des contre-la-montre où chaque participant prend le départ en solo, décallé de quelques secondes, en fonction du classement cumulatif. 

Je me présenterai là-bas bien entraîné.  Depuis trois mois, j'ai encaissé plusieurs semaines au-dessus de 150 km, voire 170 et même 200. Au niveau de l'intensité, en raison de mon défi du mois de juillet, j'ai accumulé bien des miles à allure rapide.  Puis, à la dernière semaine de juillet, j'ai reproduit fidèlement (distance, surface, dénivelé) les 8 jours du Endurrun, mais en allant seulement un peu moins vite.  J'ai pu faire l'ensemble des jours en 12h00 en me sentant relativement confortable dans l'effort, ce qui m'aurait conféré le 3e rang des éditions précédentes.  Je ne crainds donc aucunement le volume total (190 km sur 8 jours en incluant échauffements et cool-down) et je sais que je puis traverser l'intensité au point de faire significativement mieux que 12h00 en temps cumulatif.  Même si le calibre sera plus relevé cette année, j'ai très bon espoir de terminer dans le top des coureurs.  En fait, sur papier, je suis entre 3e et 5e favori.  La plupart des 50 participants, je m'en doute, auront pour objectif de seulement terminer le Endurrun.  Je serai de ceux qui, plutôt, viseront d'y performer, non inquiet d'encaisser la distance.  Je crois raisonnablement devoir viser un cumulatif sous 11h00, ce qui me mettrais probablement sur le podium. 

Je partirai le 10 août pour l'Ontario où je logerai à Waterloo même dans un Bed & Breakfast.  Ma stratégie, une fois sur place, consistera 1) courir chaque épreuve le matin, 2) aller analyser en prévision du lendemain le parcours suivant, 3) récupérer au maximum jusqu'au lendemain (sieste, alimentation, massage, etc.).  Autrement dit, je compte me mettre en mode "all for the race" durant la semaine du Endurrun.  Je suppose que cela me conférera un avantage sur les autres participants qui ont leur domicile dans les environs et qui seront requis par toutes sortes de distractions ou d'empêchement à optimiser leur performance.

Il ne fait cependant aucun doute qu'il s'agira pour moi, comme pour tous les autres concurrents, de la plus intense expérience de course. 7 compétitions en 8 jours, dont plus de la moitié au-delà du demi-marathon ou contenant des côtes majeures à de quoi intimider n'importe qui.   Après tout, dans la même semaine, je vais faire un demi-marathon, un 10 km, deux 15 km, une course de trail de 30km, un cross de 26 et...ah oui, c'est vrai, un marathon !  Ce n'est pas une mince affaire, n'est-ce pas ? 

Une des traditions des organisateurs est de demander aux participants, avant le départ, de dire comment ils se sentent en trois ou quatre mots.  Pour ma part, je dirai, en anglais bien sûr puisqu'il s'agit d'une compétition en Ontario, que je me sens "confident, but injury prone". 

J'ai bien hâte quoique les douleurs accumulées dans les derniers mois me font toujours criante un abandon en cours de route.  Dans tous les cas, je donnerai chaque jour, une fois là-bas, des nouvelles de chacune des journées sur la page Facebook du Dodecathlon 20.12 

En attendant, voici déjà un vidéo de la 2e étape de 2008, le 15 km contre la montre, qui donne un aperçu de l'ambiance:

lundi 9 juillet 2012

Mes hommages, M.Zatopek.

Le défi du mois de juillet est terminé.  C'est jusqu'à présent le seul pour lequel je puis déclarer victoire sans apporter de nuance. 
En effet, le marathon intérieur a été réussi en janvier, mais avec un chrono semi-satisfaisant.  De même, j'ai fait un marathon sur tapis roulant en février, mais en concluant l'épreuve avec une minute de plus que l'objectif.  En mars, je réussissais à faire les sept épreuves de piste au championnat provincial civil d'athlétisme, mais les deux dernières en y arrivant de peine et de misère.  En avril, je n'ai pu faire autrement que de remettre à plus tard l'expédition entre Montréal et Québec.  En mai, bien que la naissance de mon fils soit un prétexte suffisant, je n'ai pas été en mesure de courir 5 km en cani-course.  Enfin, en juin, même si j'ai couru toute une nuit en réalisant 12 km de plus que l'objectif premier, il m'a fallu dévier du trajet initialement envisagé.  Bref, jusqu'ici, je suis contraint de reconnaître quelque chose : la réussite, même en étant méticuleux, perfectionniste, zêlé, "tought", discipliné et résolu, ne s'apprécie souvent qu'au prix de certains compromis.  Cela ne signifie pas qu'il faille tricher avec la notion de réussite pour la transformer a posteriori en succès à grands coups d'interprétations consolantes, mais bien que celle-ci soit intrinsèquement différente en pratique de l'a priori idéal qu'on tentait théoriquement d'atteindre avant d'être confronté avec les adaptations du monde réel.  Pourtant, dans le cadre de mon défi du mois de juillet, je puis dire que j'ai en tous points réussi (même de beaucoup dépassé) ce que, initialement, j'avais établi comme le succès, et ce, sans dévier le moindrement du monde de mon idée préconçue de ce qu'était la réussite.

Avant de donner le compte-rendu du défi du mois de juillet, je prends quelques phrases pour en rappeler les grandes lignes.  Il s'agissait de faire, durant une semaine, soit durant sept jours, ce que le coureur tchèque des années 50 Emil Zatopek réalisait quotiennement durant sa brillante carrière d'athlète.  Ce dernier commençait chacune de ses séances d'entraînement journalière par une alternance de cinq fois 200m rapide et 200 lent.  C'était là son échauffement.  Ensuite, le coeur de l'entraînement consistait à courir des intervalles de 400m entrecoupés de 200m de jog (footing) de récupération.  Jusque là, rien de particulièrement étrange pour les coureurs expérimentés.  C'est du connu, du familier, de l'assez banal.  Sauf que Zatopek, notamment en 1956, répétait 40 fois la distance dans la séance.  Autrement dit, il faisait, presque chaque jour de l'année, 40 fois 400m (rapidement) avec 200m de "récup".  A la fin, en guise de "retour au calme", il effectuait à nouveau 5x200 (R:200 jog).  Au total de chaque séance il en venait à parcourir 28 kilomètres, dont 18 de ceux-ci en intensité (16 km pour les 40x400m).  Chaque semaine, cela représentait 196 km, dont 130 en intensité.  Ou, si vous préférez...280 x 400m rapide + 70 x 200m rapide + 350 x 200m lent.  C'est, comme on dit, "du gros stock".  Ce n'est pas le volume qui est ahurissant, car bien des coureurs de haut niveau font plus que ce 196 km hebdomaire.  Ce qui impressionne, c'est la quantité jumelée au pourcentage (65%) de kilomètres courus à une haute intensité (85-95% de la VAM).  Le défi du mois de juillet était de se frotter, durant une semaine, à ce régime apparemment inhumain d'entraînement.

Ainsi, de façon standard, je me suis réveillé le matin, ai mis mes shorts, suis allé (à jeun, oui !) sur le bord de la route où j'ai maison et j'ai lancé la "séance Zatopek".  Avant lundi le 2 juillet, je m'étais préparé en augmentant progressivement, depuis trois mois, le nombre d'intervalles de 400m dans une séance hebdomaire.  J'en suis ainsi venu à faire,  six semaines avant le défi, 30 fois 400m en 1:21 de moyenne et, trois semaines avant, 36 x 400m en 1:27.  Ce furent là mes deux meilleures séances préparatoires en vue de juillet.  Celles-ci ont été suffisante pour, à l'aube de lancer le défi de juillet, me donner une relative confiance d'atteindre (pour peu que je me rende au bout de la semaine) l'objectif initial qui était de réussir à maintenir une moyenne, sur l'ensemble de la semaine, inférieure à 1:35 pour les 280 répétitions de 400m. 

....puis j'ai réussi à maintenir une moyenne de 1:26.50.  C'est là, et de beaucoup, mieux que ce que je m'aurais cru en mesure de faire.  En fait, plutôt que de décrire chacune des journées, je me contente ici de présenter un tableau récapitulatif ou statistique:

Semaine Zatopek: W-up 5 x 200 (R:200); 40x400 (R:200); C-down 5 x 200 (R:200)
Jour Heure de départ Température Vitesse moyenne 400m Vitesse de la moyenne en km/h Plus rapide Plus lent Temps total de la séance Douleur (s) significatives
Lundi 2 juillet 10h30 27 degrés, nuageux avec soleil 01:26.25 3:36/km 1:21 (40e) 1:31 (1ier) 2h25 3e métatarse pied droit, hanche droite
Mardi 3 juillet 10h30 25 degrés, frais, vent moyen 01:24.0 3:30/km 1:19.00 (40e) 1:26.00 (plusieurs) 2h25 Hanche droite
Mercredi 4 juillet 10h30 23 degrés, frais, nuageux 01:25.3 3:33/km 1:18.00 (40e) 1:28.00 (2e) 2h14 Bandelette illio-tibiale droite.
Jeudi 5 juillet 10h00 25 degrés, humide, vent moyen 01:23.5 3:29/km 1:15.00 (40e) 1:27.00 (2e) 2h24 Genou droit à la fin
Vendredi 6 juillet 11h30 31 degrés, chaud, vent moyen 01:26.4 3:36/km 1:18.00 (40e) 1:31.00 (1er) 2h25 Bandelette gauche légèrement, 3e métatarse droite légèrement
Samedi 7 juillet 10h00 31 degrés, chaud, vent moyen 01:28.75 3:42/km 1:18.00 (40e) 1:38.00 (1er) 2h23 Bandelettes, genoux (droit surtout), pied droit ampoule
15h00 24 degrés, vent 01:31.40 3:48/km 1:10.00 (40e) 1:40.00 (16e) 2h13 Estomac vraiment mal en point (poutine 2h30 avant non recommandé)
Moyennes:
11h08 26.5 degrés           01:26.50 3:36/km 01:17.00 01:31.50 2h21




Comme on le voit dans le tableau ci-dessus, j'ai maintenu une vitesse moyenne pour l'ensemble des 400m nettement mieux que celle correspondant à l'objectif de 1:35 (4:00/km). Mieux de presque 9 secondes.  Ce que je m'explique mal, pour ne pas dire ce que je ne comprends pas du tout, c'est comment il a fallu six jours avant que la cadence de chaque intervalle soit affectée significativement.  Autrement dit, comment se fait-il que je n'aie pas "cassé" avant ça ?  Même que ma meilleure journée fut la 4e, alors que j'avais déjà 54 km d'intensité en trois jours dans le corps avant de la commencer.  La plus faible température et le soutien d'un partenaire (voir plus loin) ne suffisent pas, à mon sens, à expliquer ce maintien du niveau de performance à ce stade de la semaine.  Cette question du maintien d'un relativement bon niveau de performance durant le trois quart de la semaine vient heurter mes connaissances et mon expérience quant au sujet de la récupération et de la fatigue musculaire.  Je n'ai pas, pour l'instant, de réponse à cette interrogation.  Par contre, le report de la fatigue à la fin de la semaine a eu pour effet de me faire juger le quotidien d'Emil Zatopek moins inhumain que je ne le pensais initialement.  Finalement, je trouve que c'est humain.  Mais, ok, c'est "tought".  Chapeau bas M.Zatopek !

Pour moi, le plus difficile fut deux choses.  Premièrement, et ça je m'y attendais, les douleurs articulaires, tendineuses, ligamentaires ou musculaires furent assez fortes durant la semaine.  Il n'y a pas une journée, de la première à la dernière, sans que des inconforts (que d'autres appeleraient blessures) ne viennent contrarier la quiétude de l'entraînement.  Avec le temps, j'apprends que les douleurs passent beaucoup plus que ce qu'on croit, que ce que notre inquiétude craind, que ce que les thérapeutes ou conseillers suggèrent, pour peu qu'on en prenne soin et qu'on accepte qu'elles ne sont pas nécessairement des signes avant-coureurs de gravissimes problèmes (même quand ça fait très très mal...).  Je me demande si Emil Zatopek avait mal partout en courant ?  Je parierais que sa motivation avait raison de ses douleurs, car il a maintenu une constance à travers le temps qui, j'en suis persuadé, a dû charrier son fort lot de complications ou irritants physiques.  Je ne pense pas que les ampoules arrêtaient Zatopek.  Ni que les mots terminant en "ite" ou en "algie" ait meublé l'espace mental chez lui occupé par la détermination.  Deuxièmement, ce qui ne fut pas toujours aisé fut justement de garder la tension mentale pour bien réaliser chacun des intervalles.  A longue, durant la semaine, la hargne pour aller pousser la machine sur d'aussi répétitifs efforts s'amenuisaient.  Bien que de plus en plus familière, la séance de 40 x 400m ne devenait pas synonyme d'agréable légèreté !  Pourtant, après seulement quelques jours, une habitude à l'effort s'installait.  Alors qu'il y a quelques semaines, en préparant le défi de juillet, je me sentais fier d'avoir réussi 25 intervalles de 400m, je me suis retrouvé, cette semaine, à parfois me surprendre avec des pensées telles que "ok, Robin, il n'en reste QUE 25.  SEULEMENT ça, presque RIEN, ce n'est plus l'heur de s'économiser".  En d'autres mots, j'ai progressivement repoussé, mentalement, durant la semaine, le seuil à partir duquel un entraînement me paraît "costaud".  Désormais, en bas de 20 intervalles de 400m (supposant un pace 5-10 km avec 200 de jog de repos), cela ne me paraît plus une grosse séance.  Il y a peu, 20 x 400m m'aurait semblé une séance "conséquente", "particulière"...  J'en conclus que ce qu'on juge gros ou petit en matière d'entraînement est très relatif à notre habitude et notre expérience vécue.  Je ne doute pas qu'après quelques mois, voire seulement quelques semaines, Zatopek ne jugeait plus sa traditionnelle séance quotidienne exigeante.  On "n'oublie rien, on s'habitue, c'est tout" chantait Brel avec raison. 

Cela dit, je suis d'autant plus heureux d'avoir été accompagné par deux coureurs durant la semaine que ceux-ci ont dû à leur tour repousser leur limite.   Le jeudi matin, Éric Pépin, triathlète, coureur et père d'une jeune fille que j'entraîne au sein des Kalenjins, est venu faire un "petit" 30 intervalles avec moi.  C'était pour moi un stimulant lors de la mentalement délicate 4e journée et, pour lui, un dépassement de sa limite antérieure d'intervalles.  Puis, pour "ceriser" le sunday (donc dimanche dernier !), Maxime Bilodeau est lui aussi venu faire sa trentaine de répétitions.  Je remercie ces deux coureurs qui ont allégé l'aventure à deux moments où il aurait été tout particulièrement possible que s'allourdissent davantage les jambes, ou l'esprit...

Enfin, bien que réaliser une telle semaine me paraisse moins ardu que ce que j'anticipais depuis longtemps (d'autant qu'une seule séance de 40 x 400m me semblait débile dans un passé pas si récent) je rends tous mes hommages à Zatopek.  Il faut une volonté de fer, sans même parler d'une rare constitution physique, pour encaisser un pareil régime d'entraînement sur une longue période de temps.  Je n'aurais sans nul doute pas tenu deux autres semaines avant d'être réellement blessé, surentraîné, ou tout simplement épuisé, et ce, même en m'administrant tous les petits soins possibles.  Bien sûr, en évitant de courir à la chaleur de juillet, en éliminant mes activités d'entraîneur, en négligant davantage mon rôle familial, et en faisant ceci ou cela pour maximiser ma récupération, je suppose que j'aurais pu tenir le coup un bon bout de temps encore.  Or Zatopek l'a fait durant des années.  C'est humain, mais, justemment, dans ce que les êtres humains exceptionnels démontrent de grandiose.

Bien qu'inférieur au légendaire coureur tchèque, j'en ressors néanmoins avec l'orgeuil d'une réussite que je devine peu ou très peu égalée dans l'histoire de la course au Québec.  A vrai dire, je ne connais pas de québécois ayant, récemment ou jadis, encaissé de pareille semaine en terme de densité.  J'ai tout de même fait, en sept jours, 201 km (oui, je suis allé joggé 5 km le dimanche soir pour dépasser le 200 !).  Surtout, là-dessus, il y a eu plus de 116 km en 3:36/km, soit pour moi ma vitesse de 5-10 km (environ 90% de ma VAM).  Tout cela dans les chaleurs du mois de juillet, au milieu d'obligations personnelles variées et à travers plus de 15 heures d'implication en coaching et avec, à la maison, deux enfants de moins de 2 ans.  Puis, ne l'oublions pas, mais cette semaine a été réalisée non seulement 10 jours après une course nocture de 79 km, mais dans une période où la moyenne de mes semaines d'entraînement avoisine les 150 km.  Indépendamment de ces éléments très personnels, je me questionne sur le nombre et le nom de ceux qui ont égalé en genre ma semaine d'entraînement.  Pouvez-vous m'instruire là-dessus ?  J'aimerais bien savoir qui sont les "hardcore" parmi les "hardcore" de l'histoire de la course dans la province... 

Enfin, heureusement que ma blonde, Marianne, a été compréhensive durant la semaine et, plus encore, depuis le début de l'année "dodécathlesque".

Pour ceux qui croient maintenant que je suis mûr pour un répis, détrompez-vous.  Dans 1 mois exactement commence le défi du mois d'août.  EnduRun International.  Celui-là, j'ai hâte.  Un peu peur bien sûr, mais surtout hâte.  J'ai confiance d'être prêt à temps.  J'en donnerais un apperçu dans quelques semaines lors du prochain message sur le blog.  

Par ailleurs, il est maintenant possible de sécuritairement faire des dons en ligne à la Fondation Terry Fox pour laquelle j'amasse de l'argent toute l'année et que je remettrai à l'occasion du défi du mois d'octobre.  Pour soutenir mon aventure de 2012 en général, particulièrement mon défi d'octobre et, surtout, surtout, surtout, la recherche contre le cancer, il suffit de se rendre sur la page consacrée au Dodécathlon sur le site de la Fondation Terry Fox.  Merci.

        

dimanche 1 juillet 2012

Solstice d'été


20h46, 0 kilomètre, St-Grégoire: je prends le départ pour une longue sortie de course qui devra me tenir éveillé toute la nuit.  Le défi du mois de juin est lancé.

Durant la journée, j'ai fait deux petites siestes après avoir, comme précédemment durant la semaine, vérifié la météo qui m'indiquait que cette nuit pourrait enfin être LA nuit.  Les précédentes nuits s'annonçaient orageuses, repoussant finalement le départ jusqu'au 21 juin, date cependant exacte du solstice d'été.   Très bien finalement, très symbolique.  Ayant d'ailleurs été dans l'incertitude de la date du départ, je décidai les jours d'avant de continuer l'entraînement régulier comme si je n'avais pas à bientôt courir du coucher au lever du soleil.  C'est ainsi que, la veille, je faisais 26 km en 2h00 en entraînement.  Allait-ce me pénaliser ou entraver la réussite du défi du mois de juin ?  De même, ces ambivalences de jour de départ ont fait se décommander les partenaires potentiels pour des tronçons du défi.  Allait-ce la solitude me décourager ? 

10h56,  22 kilomètres, St-Léonard-d'Aston: je fais un saut au bercail ou, plutôt, exactement, je passe le perron avant par mon domicile pour faire le plein de ravitaillement (Boost Calories +, 1 litre de Coke mélangé à 500ml de Pedialyte, deux barres de céréales, une barre de chocolat).  Étrangement, j'ai anormalement mal au genou alors que je n'ai jusqu'ici fait que 22 km.  C'est là moins que la distance journalière que je fais souvent en entraînement.  Le rythme est cependant bon, facile à maintenir.  Je jogge, en moyenne, à 5:25/km et je fais un 1000m sous 5:00/km (12km/h) à tous les 10 km.  Je me ballade en écoutant la première chaîne de Radio-Canada sur mon lecteur MP3.  J'avance doucement contre le vent de face qui, en cette nuit chaude où il fait 29 degrés, rafraîchit grandement.  Je remplis donc mon sac de coke/pedialyte, prends les vivres nécessaires, dis un unique bonne nuit à ma blonde qui est sortie sur la galerie pour ce furtif passage avant d'aller au lit, et je file à nouveau pour la nuit en laissant la petite famille endormie derrière moi.

Initialement, je prévoyais, de ce point, me rendre à Victoriaville jusqu'au sommet de la montagne (à 67 km du point de départ).  Or, la veille pour des raisons logistiques (comment en revenir à 5h00 du matin si je n'ai personne pour me ramener en auto ?) et météorologique (si, finalement, il se mettait à faire orage, où irais-je perdu entre deux champs dans un rang de campagne ?) je décidai d'emprunter un circuit de 30 km autour de chez moi.  Or, après seulement 2h20, ayant déjà mal au genou droit, j'optai, sécurité oblige, pour rester dans les environs de chez moi, gravitant sur un circuit de 15 km qui m'est familier.  Si tout se déroulait bien, je prévoyais aller finir à 5 km de chez moi, sur le bord de l'eau, sur la rive, près des rapides, de terrains pittoresques que ma blonde et moi avons récemment achetés. 

1h00 am, 42,2 km, St-Léonard-d'Aston: je termine la distance du marathon en un peu moins de 4h10.  Les choses vont relativement bien.  En fait, outre la chaleur qui refuse de tomber (il fait encore 27 degrés et je sue abondamment), tout suit son cours.  En repassant par mon domicile pour faire le plein de victuailles installées sur ma galerie, je m'aspèrge -enfin- la tête à même l'arrosoir du jardin.  Grand bonheur.  Sinon, le genou droit fait mal, mais je tolère, j'encaisse, j'endure.  La moitié de la nuit est faite.  Les batteries du lecteur MP3 ont rendû l'âme il y a quelques temps déjà.  Moi je tiens bon.  Par contre, mes paupillères tombent.  Je suis fatigué.

2h58 am, 60 km, St-Léonard-d'Aston: les choses se sont gâtées.  Premièrement, mon estomac ne tolère pratiquement plus rien.  A tout le moins, la nourriture solide n'entre plus dans mon corps.  Les tentatives d'insertion forcée de barre tendre se sont soldées par un violent crachat de refus.  J'ai l'estomac noué, bloqué, "jammé".  Oui, c'est une sensation presque agréable et propice pour la course !  Cela m'est cependant riche d'apprentissage, car je respecte depuis le début de la nuit la même diète en courant que celle prévue initialement pour le défi Montréal-Québec.  J'apprends à la dure que cette dernière n'est pas au point.  Trop riche ?  Peut-être.  Trop sucrée ?  Peut-être.  Pourtant, il me faut théoriquement absorber 7000 calories durant l'épreuve.  Malheureusement, après 4000 calories, mon système semble saturé.  Je poursuis néanmoins avec l'espoir de ne pas terminer la nuit en hypoglycémie.  Je m'efforce de boire sucré et "électrolyté", mais là encore ça passe mal...  Tout est beurk !  Deuxièmement, mon genou droit fait très mal quoique l'aggravation de la sensation soit sourde et subtile au lieu de virulente et sévère.  Rien à dire de plus là-dessus, sauf que ça commence à être impossible à ignorer à chaque foulée.  Je ne sais pas si cela sera difficile à soigner après le défi, mais je sais déjà qu'il est certain que mon genou n'en sortira pas indemne.  A ce point cependant, il n'est pas question d'arrêter pour ça.  Troisièmement, je viens de traverser un long passage à vide mentalement.  Il me semble que ce soit à celui-ci qu'il faille attribuer ma baisse de régime et ma vitesse moyenne maintenant à un rythme plus lent que 6:00/km.  Et j'ai depuis 10 km cessé de faire mon 1000m en bas de 5:00/km à tous les 10 kms.  Le corps n'a plus le coeur à cela (plus le coeur au sens de "mal au coeur" !).  Par contre, j'anticipe le progressif lever du soleil pour la prochaine heure et, avec lui, le retour de la clarté.  Cela fera sentir la fin de la nuit et l'espoir de réussite, à toute fin pratique évidente à ce stade.  Cela devrait aussi me réveiller et raccourcir l'impression subjective de longueur des secondes.  Il y a peu, les derniers veilleurs, ceux qui ferment les bars, sont allés se coucher (non sans, cependant, avoir lâché de leur terrasse, bière vide à la main, voyant un gars courir à cette heure de la nuit, un "cr... y é dont ben crinqué lui !"). 

4:30 am, 75 km, St-Léonard-d'Aston: dernier passage par la maison -sans bien sûr y entrer comme toujours- l'estomac ne répond plus du tout, le genou parle pour sa part trop fort, la fatigue est totalement contrôlée, la lampe frontale a depuis longtemps cessé d'éclairer suffisamment, mais de toute façon le soleil vient de se lever.  Il fait clair.  Je m'en vais vers la fin du défi.  Je prends la route des terrains du bord de l'eau.  Il me reste 28 minutes à courir avant l'heure officielle de lever du soleil.  Ma question est : arriverai-je à faire 80 km durant la nuit ?

4:58 am, 79.25 km, St-Léonard-d'Aston, bord de la rivière, devant les rapides au matin je suis lent et n'avance plus: Fin du défi.  Sans satisfaction particulière ni émotion forte, sans grande fatigue non plus, avec des douleurs normales aux jambes et anormale au genou droit, je clôture la nuit avec un peu moins de 80 kms parcourus.  En fait, si on tient compte de l'erreur habituelle de la montre GPS en zone couverte, j'ai dû faire un peu plus de 80 km, mais là je vais me contenter officiellement du chiffre de 79.25.  Avec l'entraînement de la veille, ça fait quand même 105 km en deux jours.  Cette nuit, j'aurai maintenu une moyenne de 6:07/km (un peu plus de 10 km/h).  J'aurai couru durant exactement 8h07, signifiant que les arrêts de ravitaillement ne m'auront pris, au final, que 5 minutes (dont presque 4 pour le premier).  Je puis dire que, une fois dans ma vie, j'aurai couru durant toute une nuit. 

J'aurai appris, durant la nuit, que je peux ne pas avoir peur en courant seul dans le noir.  Évidemment, une longue partie a été faite sous les rassurants lampadaires de la municialité, mais je ne crois pas que cela aurait été sérieusement paniquant de courir à la totale noirceur.  Puis, j'ai appris que mon défi Montréal-Québec exigeait des ajustements: d'une part alimentaires et, d'autre part, d'objectif puisque 100km en 10 jours durant 3 jours risque d'être plus ardu que je ne le pensais.  Enfin, encore une fois, j'ai appris à garder la discipline malgré les douleurs ou les moments difficiles.  Ce fut, dois-je l'avouer, une nuit plutôt facile.  Relavitement bien sûr !  Elle l'aurait été encore davantage si le mercure n'avait été aussi élevé.  Jamais n'ai-je pu me sentir pleinement au frais dans les 6 dernières heures.

*** Notez que, le 22 juin, j'aurai ensuite besoin de plusieurs heures pour remettre mon système digestif en place et de deux ou trois jours pour rétablir un cycle veille/sommeil agréable.  Par contre, malgré la douleur au genou, je ferai un 40 km dans les jours suivants, dont un entraînement (une "progression run") de 21 km, avec les Kalenjins, en 1h30 trois jours plus tard.  La semaine suivante, celle qui se termine au moment d'écrire ces lignes, je ferai un total de 105 km incluant deux séances d'intensité. 

Maintenant, j'en suis à prévoir, dès la semaine du 2 au 9 juillet, de faire mon défi suivant, soit celui qui suscite la plus vive réaction chez les connaisseurs, les assidus de la course à pied.  Lundi 2 juillet, je lance mon premier jour de 40x400m avec 200m de jog de récupération (et 5x200m avec 200 de jog comme échauffement et cool-down).  Si tout va bien (entendre: si le genou tient le coup), je ferai cela chaque jour de la semaine.  J'écrirai sur ce blog, en milieu de semaine prochaine, après la 3ième ou 4ième journée, un très court texte pour indiquer la procédure et le déroulement du défi. 

Merci encore de suivre mes folies.